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HOMMAGES
HOMMAGESLes Mots sont des îles
Lettre à Michel Bénard
J’écris depuis si longtemps dans mes enfances incertaines qu’il ne m’est pas souvenir que nous nous soyons quittés… Je sais pour deux les jours d’errance dans nos cœurs, dans nos âmes, les jours de solitudes profondes, intenses, et puis les magies des verbes et des rencontres que la Poésie intercepte au milieu de nos musiques d’âme. Il en va ainsi de nos chemins de vie et de cette Amitié habillée comme un fantôme d’amour…
Nous sommes de ce peuple des silences, loin des fanfares médiatiques où l’Ecriture ose être ce que nous devenons et n’est point reflet de ce que les autres aimeraient que l’on soit. Nous sommes dans la sincérité de nos mensonges, et parfois, dans la légèreté de nos vérités…
Je devine bien souvent l’amertume des songes, ces imaginaires transis de pluies et d’hivers indomptés que nous côtoyons près des marécages des mots, quand la Poésie s’insinue dans la marge de nos cervelles… Nous écrivons, c’est une possibilité que nous nous accordons, mais ne sommes-nous pas comme des petits canards faisant le trottoir, un soir de ville de cathédrale quand les alcools s’échappent de nos regards pour se planter sous les réverbères d’un abribus, à nous regarder passer et rire, et se savoir si bien ensemble… Il en reste ce savoir que nous étions en Vie, que ce n’était qu’un moment, qu’un fragment de nos existences…
Je riais dans cette nuit d’appartenance, je m’étais promis d’écrire sur toi, d’écrire pour toi, à cet instant où des araignées-femme retissaient dans ton âme les trames des fractures anciennes, et dans le même temps, nous reprenions le cours de nos existences passées, cueillant des couleurs au-delà des miroirs, quand l’âme des aimés que nous ne pouvions voir nous attendait au silence…
Nous étions entre gens d’une même décence, de ce qui ne se dit point mais qui s’acharne à être, se quitter ne pouvait être un déchirement puisque le fil se prolonge indéfiniment, et que sur le rouet des mots, j’effiloche l’incroyable d’une éternité dans cette nuit d’écriture…
C’est ainsi mon Ami, comme un don incertain à peine effleuré et qui se perpétue, car si peu que nous nous en sommes allés nous recommençons à nous attendre…
J’écris depuis si longtemps dans mes enfances incertaines qu’il ne m’est pas souvenir que nous nous soyons quittés…
A toi,
Christian Boeswillwald
HOMMAGESA la fois peintre et poète, Michel Bénard s'exprime
dans ces deux disciplines avec talent et bonheur.
C'est un homme attentif à toutes les émanations de la Beauté,
à tous les échos qui lui viennent de tous les horizons culturels.
Il dit d'ailleurs "vouloir prendre conscience et demeurer
dans la prudence des mots" et réalise en effet l'exploit
"de faire en sorte que la poésie devienne visible".
Ceux qui ont vu ses superbes oeuvres, collages
ou techniques mixtes peuvent en témoigner.
Chaque poème de Michel Bénard est comme une révélation
à lui faite par toutes les forces mystérieuses de la Nature. Il sonde
"la mémoire des pierres", souhaite que "l'homme et la femme
redeviennent flammes humaines". Il déifie ce qui lui parle
un langage secret plein de rêves et de sagesse
et son art s'apparente alors à celui des enlumineurs de la Perse
ou des peintres des icônes. On le voit, son univers est à l'échelle du cosmos
et sa poésie est faite de tous les éclats fabuleux
des lumières groupées dans la Lumière.
Rien de gratuit, donc, chez Michel Bénard, que ce soit dans les recherches
de la pensée ou dans l'art d'assembler des mots harmonieux et justes.
Même instinctivement, il fait entrer le divin dans ses oeuvres.
Il a des accents prophétiques et la cadence de ses vers fait penser
aux mélopées des moines tibétains ou bénédictains.
Cela va loin, très loin dans la conscience. C'est écrit dans le ciel,
oserai-je dire, car, comme il le dit : "Les mots sont déjà
de trop lorsque nous marchons dans les étoiles."
L'écriture de ce poéte est une véritable somme de toutes les questions
fondamentales qui tourmentent les hommes de haute pensée.
Il faut le lire lentement, patiemment, aller de creusement en creusement
pour en extraire la substantifique moelle.
C'est le cheminement d'un homme fraternel et d'un esthète :
ce sont des espèces qui se font rares.
JEAN-YVES LE GUEN
journaliste,écrivain
à Michel Bénard,Dans ce « regard du miroir »* qui est tien
et t’appartient Poète, mais dont nous sommes
les élues, je sais gré à ton Verbe de l’hommage
rendu dans le respect à toutes ces femmes aimées
celles de l’instant comme celles d’éternité
ces amantes reliées en l’unique bouquet
de fleurs aux champs glanées et rassemblées
par la seule volonté d’une tige flexible
qui sans les comprimer sut les retenir
les disposant le temps d’un été dans un vase
au col aussi vaste que notre nécessité
fugace mais identique à tous de se consoler
de l' éphémère destinée en se rassurant
par le besoin d’absolu de l’Amour
dans des amours toujours à ensemencer
Jeannine Dion-Guérin
* Le regard du miroir, titre de cet auteur poète
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